Lors d’une consultation réunissant le médecin, la personne « alcoolique » et son·sa conjoint·e, que dire à celui·celle-ci ?

Si c’est la première fois que nous rencontrons cette personne – et ceci en présence de la personne « alcoolique » –, voilà les sujets à aborder ou les propos à tenir.

Reconnaître la souffrance de l’autre avec émotion et force. Parfois, ce·tte conjoint·e ne nous cache pas sa souffrance, d’autres fois il·elle se drape encore et toujours dans une attitude de soutien ou de codépendance. Le médecin prononcera très utilement des paroles telles : « Madame, vous n’en montrez rien, mais permettez-moi de vous dire que je n’ai aucun doute sur votre souffrance ; si votre mari est mal… vous aussi vous êtes très mal ». « Il y une souffrance en miroir ».

Une notion qui reviendra souvent sur la table : « Il n’a aucune volonté ». Il sera bon de préciser que boire ou ne pas boire n’est plus un sujet rationnel à ce stade du mésusage d’alcool. C’est un acte émotionnel dans un contexte d’une toxicomanie à l’alcool où le sujet qui boit a perdu de fait la liberté de ne pas boire. Nous pourrions préciser à cette personne : « La dépendance à l’alcool et le fait de ne pas pouvoir s’arrêter n’a rien à voir avec la « volonté ». Comme médecin, il me serait d’ailleurs impossible de combler une lacune de volonté. Les soins consisteront à apprendre à votre conjoint des stratégies pour résister à ses envies, aux sollicitations, à mieux gérer ces émotions qui déclenchent l’envie ».

Dernier sujet à aborder utilement : faire comprendre au·à la conjoint·e qu’il est normal que, malgré tous ses efforts pour faire arrêter la consommation de son proche, les résultats ne soient pas au rendez-vous. Nous pourrions dire : « Vous avez tout fait pour essayer de l’en sortir et de le sauver… et ça ne marche pas. C’est normal. Cela ne marche pas justement parce que vous êtes sa conjointe. D’avoir contribué à mener votre mari vers la consultation est un excellent résultat. Maintenant, vous devez passer la main, prendre soin de vous et déculpabiliser de ne pas avoir réussi à le faire arrêter ».

Il y aurait évidemment bien d’autres choses à dire ou à entendre. Peut-être à l’occasion d’autres consultations. Mais ce qui est précisé plus haut peut être dit  en dix minutes, le temps du débriefing d’une consultation dont le premier temps se faisait en tête-à-tête médecin/patient.