Les hommes « alcooliques » précisent souvent eux-mêmes qu’ils ne sont pas « violents », voulant se rassurer et voulant rassurer leur interlocuteur soignant. Si l’anamnèse est un peu insistante, ils admettent « parfois une violence, mais uniquement verbale », ajoutant avoir déjà bousculé leur conjointe « sans la faire tomber » et seulement « une ou deux fois », donc ils ne sont « pas vraiment violents ».

Quand, dans l’anamnèse, nous ouvrons le chapitre famille et couple d’une patiente avec un mésusage d’alcool, il est tout-à-fait opportun de poser explicitement la question de la violence sexuelle subie avec une question comme celle-ci : « Votre mari/compagnon n’a-t-il jamais été violent avec vous ? Violence verbale ? Violence physique ? Violence morale ? Violence lors des rapports sexuels ?». Il n’est pas exceptionnel de rencontrer des femmes ayant accepté la sexualité uniquement sous l’effet de boissons alcoolisées et ce depuis la nuit des temps. Ou accepté certaines formes de sexualité uniquement en étant « imbibées ». Certaines de ses femmes « alcooliques » veillent scrupuleusement à boire de façon anticipée lorsque des rapports sexuels sont prévisibles. Que certaines de nos patientes « alcooliques » aient un passé d’enfance abusée n’est pas exceptionnel non plus. Qu’elles n’aient même pas parlé de ce passé à leur compagnon contemporain n’est pas exceptionnel non plus. Si un climat de confiance est créé, toutes ces confidences ne sont pas exceptionnelles. Ces femmes seront parfois très reconnaissantes à leur médecin d’avoir ouvert ce chapitre de leur vie. Il n’y a pas que l’alcool qui sert « d’anesthésiant » dans ces situations de violence subie ou d’antécédents d’inceste : le recours aux opiacés, BZD ou autres psychotropes est fréquent dans de telles vies.
Posons donc cette question à nos patientes !